Baignades en eaux troubles, une saison en Pays d’Iroise – Fin

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Episode 11 : vos questions, nos réponses.

Au cours des 10 épisodes qu’a duré notre feuilleton, vous avez été TRÈS NOMBREUX/EUSES à nous suivre, notamment sur les réseaux sociaux. Vous avez également réagi au moyen de questions et de demandes d’éclaircissements complémentaires.

En voici quelques-unes parmi celles qui nous ont semblé les plus pertinentes, ainsi que les éléments de réponses que nous pouvons y apporter. 

Soyons clairs : nous n’avons pas forcément réponse à tout, mais certain.es d’entre-nous étudient et maîtrisent très bien le sujet pour l’avoir étudié depuis maintenant bien des années, malheureusement. Ensuite, la contradiction, lorsqu’elle est bienveillante, est source de discussion, de réflexion, et d’évolution dans nos systèmes de pensée comme dans nos actes.

Évidemment, à ceux qui nous reprochent de “leur chanter la messe”, nous n’avons pas grand-chose à répondre car celà laisse peu de place à une discussion intelligente.

Aux autres, qui ont parfois posé beaucoup de questions dans le seul but de comprendre, sans accepter benoîtement et d’emblée nos explications, qu’ils/elles en soient grandement remercié.es. Ce dernier épisode est pour eux.

⇨ Question : Quels critères vous permettent de dire que ce ne sont finalement pas des pollutions à court terme? 

Notre réponse :

Après tout, en effet, la règle pourrait permettre d’éliminer les pollutions, à condition qu’elles soient de courte durée.

Mais ce n’est pas le cas : la directive fixe 4 conditions, dont deux seulement sont réunies en Iroise :

1 – Qu’il s’agisse d’une pollution bactériologique, ce qui est le cas.

2 – Que la durée soit de moins de 72h, c’est généralement le cas également.

3 – Mais aussi que « les causes soient clairement identifiables »… et là, ce n’est pas le cas !  La pluie est un événement déclenchant, mais les bactéries, causes de la pollution, viennent d’ailleurs, et l’ARS n’en sait rien (ou fait semblant de ne rien savoir). Et aucune enquête n’est menée par la mairie ou l’ARS pour identifier ces causes.

4 – Enfin, dernière condition, « pour laquelle l’autorité compétente a établi des procédures afin de prévenir et de gérer de telles pollutions à court terme, telles qu’établies à l’annexe II ». Noter : « prévenir les pollutions » (donc, il ne suffit pas de sortir les baigneurs de l’eau…). 

D’ailleurs, l’annexe II distingue bien les « mesures de gestion » destinées à protéger les baigneurs, et « des mesures de gestion adéquates [soient] prises pour prévenir, réduire ou éliminer les sources de pollution« .

 La fermeture préventive, même baptisée « gestion active », n’est évidemment pas une « mesure de gestion adéquate ».

Voici par exemple les événements rapportés par la France à l’UE en 2020 pour la plage d’Illien à Ploumoguer (N° européen FRH229201M029460) :

seasonbathingWaterIdentifierperiodTypestartDateendDatemanagementMeasures
2020FRH0229201M029460bathingProhibition11/06/202019/06/2020Conditions météorologiques défavorables
2020FRH0229201M029460bathingProhibition27/06/202002/07/2020Conditions météorologiques défavorables
2020FRH0229201M029460bathingProhibition25/07/202028/07/2020Conditions météorologiques défavorables
2020FRH0229201M029460bathingProhibition13/08/202008/09/2020Conditions météorologiques défavorables
2020FRH0229201M029460bathingProhibition15/09/202017/09/2020Enquête environnementale en cours.
2020FRH0229201M029460bathingSeason15/06/202016/09/2020
2020FRH0229201M029460shortTermPollution14/09/202016/09/2020Arrêté municipal interdiction baignade

Explications : 

➔ Saison de baignade du 15/06 au 16/09 = 4 fermetures préventives (« bathing prohibition »), une pollution détectée le 14/09 entraînant une interdiction de baignade à partir du 15/09, retour à la normale constaté par le prélèvement de contrôle du 16/09, fin d’interdiction de baignade le 17/09.

➔ Aucune indication de la cause de la pollution (sinon « conditions météorologiques défavorables »), une enquête environnementale serait en cours (?), pas de mesures de gestion sinon la fermeture de la plage… et pourtant, l’événement est classé « ShortTermPollution », c’est-à-dire « Pollution à court terme », alors qu’il ne réunit que deux conditions sur les quatre fixées par la directive.

➔ Et à Ploumoguer, il semblerait que la pollution des plages vienne seulement de la mer ! https://www.ploumoguer.bzh/pollution-des-plages.php

⇨ Question : pourquoi dites vous que rien n’est fait par ceux qui s’occupent de tout ça ?

Deux cas principaux : 

Soit les pollutions proviennent de l’assainissement collectif ou individuel, et c’est à la CCPI et aux mairies d’agir, par exemple en contrôlant les ANC (Assainissements Non Collectifs) et en obligeant à réparer les installations défectueuses.

  • La CCPI a la compétence sur les ANC depuis 2005 , or son action dans ce domaine est très insuffisante. Pour s’en convaincre, il suffit de jeter un œil aux RPQS (Rapports Prix Qualité des Services) présentés chaque année en séance plénière du Conseil Communautaire : bien trop peu de contrôles…
  • Quant  aux mairies, elles n’exercent pas leur pouvoir de police, qui ne se limite pourtant pas à envoyer des lettres recommandées….

➔ Soit elles proviennent de l’agriculture (donc, essentiellement des épandages). 

  • A ce sujet, la CCPI a rémunéré la Chambre d’Agriculture pour mener auprès des éleveurs une enquête (aux frais des pollués donc), qui s’est limitée à l’analyse des fuites éventuelles aux sièges des exploitations. Rapport public en trois pages, pour en arriver à cette conclusion : « tout va bien, il n’y a rien à voir ». Évidemment, si on contrôlait les ANC de la même manière, ils seraient eux aussi tous aux normes !
  • D’où notre conclusion, qui est que les actions sont très insuffisantes, sauf en matière de communication : “tout va bien, la situation s’améliore…” 

➔ Enfin, les profils de baignade ne sont pas facilement accessibles, en Iroise notamment : il n’y a sur le site du ministère de la santé qu’un résumé en une page de rapports techniques qui font généralement une centaine de pages, qu’on peut certes demander en mairie mais qui devraient être disponibles en ligne. Et qui ne font que la synthèse des études existantes, sans la moindre étude supplémentaire.

⇨ Question : quelle est ou quelles sont selon vous LA ou LES solutions qu’il faudrait envisager ?

Voici quelques actions qui nous semblent indispensables :

➔ Commencer par reconnaître que les pollutions sont réelles (fin de la triche ARS) et inacceptables (fin du déni des élus et des pollueurs potentiels).

➔ Imposer enfin la mise à niveau des ANC non conformes sur les bassins versants des plages, avec astreintes et accompagnement via des aides éventuelles.

➔ Mener une étude systématique des pollutions bactériologiques des cours d’eau en amont des plages, afin de remonter aux sources des pollutions.

➔ Intégrer le suivi bactériologique des cours d’eau dans le suivi systématique du SAGE, et en publier les résultats en toute transparence.

➔ Saisir l’Etat pour qu’il impose l’évaluation et le suivi des rejets de bactéries dans le milieu aux ICPE (Installations Classées Pour  l’Environnement), comme c’est déjà imposé aux stations d’épuration, et pour qu’il contrôle le reste des installations d’élevage soumises au règlement sanitaire départemental.

⇨ Fin de ce feuilleton, en espérant qu’il vous aura éclairé sur un sujet qui touche directement à notre santé et celle de nos proches. 

⇨ Il existe d’autres sujets tout aussi importants en matière de santé en Pays d’Iroise. Nous en avons déjà abordé certains, d’autres suivront dans les mois à venir.

⇨ Enfin, Citoyens d’Iroise est un collectif ouvert à toutes et tous, sans exclusive et sans à priori. 

N’hésitez donc pas à nous contacter, encore moins à nous rejoindre : contact@citoyens-iroise.bzh

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